Connaissez-vous la position de l’autruche ravie?

 

 

Y ’a-t-il déjà eu en France une bonne conjoncture pour négocier une convention avec la CNAM ?

Est-ce que des budgets adéquats permettant une prise en charge actualisée des soins ont, ne serait-ce qu’une seule fois, été votés et attribués par l’État ?

De mémoire de syndicaliste, la seule réponse factuelle est NON.

Partant de ce constat, quel serait le “moment approprié” pour négocier une nouvelle convention ?

Par des éditoriaux successifs et savoureux, des syndicats dentaires signataires et bienheureux de devoir enfin endosser un costume de contestataire opportuniste, tentent de démontrer régulièrement qu’il était préférable de se satisfaire de ce qui avait été “conquis” et opter pour la position de l’autruche ravie :

– “On sort d’une crise sanitaire qui a coûté plusieurs milliards en tests et vaccins”,
– “la situation en UKRAINE doit nous faire relativiser nos  revendications légitimes ”,
–  “la convention actuelle nous protège grâce au 100% santé, une véritable aubaine pour nos chiffres d’affaires en période d’inflation”.(SIC)

Quelle est la réalité des nos exercices aujourd’hui ?

  • Une politique de prévention bucco-dentaire réduite aux seuls examens BBD, rémunérés sur une base d’un examen global avec motivation et ETP  de 30 euros tous les 3 ans. Une thèse signe le constat que les bénéficiaires de ces bilans sont majoritairement les ménages les plus aisés qui fréquentent déjà régulièrement nos cabinets.
  • Des soins conservateurs avec un remboursement 2 à 3  fois en dessous des tarifs usuels des pays développés en Europe. Ces tarifs restent par ailleurs inférieurs aux tarifs cibles calculés en 2015 (ces tarifs avaient été établis en fonction du temps nécessaire à la réalisation d’un acte par rapport au coût moyen d’un cabinet).
    La restauration 1 face à 56,77€, la 3 faces à plus de 100€, l’avulsion 1 dent avec séparation de racines aux alentours de 70€ ou encore le détartrage au-delà de 65€.
  • Des plafonds prothétiques, dans les deux paniers concernés,  aux tarifs pratiqués dans les années 1990 et qui, pour certains codes (réparation par exemple), sont inférieurs à la facture du laboratoire.

Cela fait 5 ans que nous appliquons cette convention qui fait la part belle aux actes les plus invasifs au détriment des actes de prévention ou conservateurs.

5 années durant lesquelles nous voyons nos charges augmenter sans qu’il soit possible d’en répercuter le coût, puisque 80% de nos actes sont devenus opposables.

Certains voudraient donc éviter de revenir à la table des négociations de peur de faire un « cadeau au gouvernement en lui donnant pleinement le pouvoir » ?

Oui, les revendications de revalorisation des actes  des médecins, des kinésithérapeutes et des sages-femmes, infirmiers étaient légitimes, et peu importe la conjoncture.
Oui,  les discussions de ces professionnels de santé lors des négociations avec la CNAM sont dans l’impasse avec une issue  vers un règlement arbitral pour nos confrères médecins.

Mais qu’avons-nous vu, notamment  pour ces derniers ?

A  la faveur du remaniement de représentativité lié aux  dernières élections Urps de 2021,  le constat est fait que les 6 syndicats historiques se sont réunis avec un même et unique but : être écoutés et respectés.

Pourtant,  suite à la convention proposée et imposée par le Directeur Général de l’Assurance Maladie, l’ensemble de ces syndicats a préféré la possibilité d’un règlement arbitral plutôt que  les 1,5 ou 5 euros jetés sur la table des négociations pour la Consultation MG, avec en contrepartie un engagement territorial accru et des semaines de travail harassantes.  50 ans de politique  de santé aberrante, à la petite semaine et quelques piécettes ne peuvent plus être suffisants à motiver les soignants à s’engager dans une vie professionnelle de plus en plus dégradée.

Pour la FSDL, il n’est pas envisageable de continuer 5 ans de plus dans ces conditions. Le temps est venu de mettre en place une vraie politique bucco-dentaire de préservation de l’organe dentaire et des honoraires en adéquation avec nos plateaux techniques.

La convention, signée en 2018 entre l’UNCAM, l’UNOCAM, les CDF et l’UD  se devait ”d’engager un dispositif de rééquilibrage favorisant une médecine bucco-dentaire moderne, respectueuse de la préservation de la dent et des tissus dentaires”. 5 années d’application permettent aujourd’hui de constater que ce but est loin d’être atteint pour les patients.

Ce même constat était déjà d’actualité à l’époque: “ les partenaires conventionnels reconnaissent que la rémunération actuelle de la pratique ne favorise pas assez le recours aux techniques dentaires privilégiant la préservation de la dent et des tissus dentaires”. Une clause d’indexation au mode de calcul alambiqué,  dédiée à équilibrer les effets d’une inflation avait été validée par les signataires. Nous attendons encore son application et aucune demande d’avenant n’a été faite dans ce sens par ces signataires.

La FSDL participe aux réunions plénières du 14 avril  au 25 juillet 2023, afin de trouver un accord sur un texte qui permette à chacun d’entre nous d’exercer sereinement son métier de soignant. Il s’agit de permettre aussi aux futures générations de s’engager dans  leur nouveau métier sans se poser de question sur les actes qui sont effectués à perte et ceux qui permettent de maintenir un cabinet viable économiquement : c’est une des solutions positives et efficaces permettant de lutter contre la désertification médicale française.

L’enjeu est là, il en va de l’avenir de la santé bucco-dentaire en France et de l’attractivité de notre cœur de métier. Nous serons au rendez-vous, vous pouvez compter sur nous !

 

Patrick SOLERA
Président de la FSDL